30 sur 20 de conduite, Le Pen et les apparences

Publié le par François Ihuel

 

Au-delà des vanités

 

30 sur 20 de conduite, Le Pen et les apparences

L’extrême droite et ses apparences

Il y a quelques années, j’ai écrit à Marine Le Pen. Pas un mail, pas un message anonyme sur les réseaux, une vraie lettre, en recommandé avec accusé de réception. Une lettre écrite à la main, sincère, argumentée. Je voulais comprendre, dialoguer, voire alerter.


Résultat ? Elle n’est même pas allée la chercher à la poste. Où du moins un des domestiques de la maison Le Pen n'y est pas allé à sa place, puisqu'à Saint-Cloud la demeure Le Pen est plutôt aristocratique.


C’est peut-être anecdotique, mais c’est surtout révélateur, ceux qui prétendent « écouter le peuple » ne supportent pas d’en entendre la voix quand elle n’entre pas dans leur scénario.

L’extrême droite aime se présenter comme la voix du bon sens, du peuple oublié, du travailleur trahi. Mais à y regarder de plus près, ce n’est pas du bon sens qu’elle prêche, c’est du bon spectacle. Des slogans qui claquent, des mots qui flattent les rancunes, et derrière, du vide. On joue sur la peur, on maquille la haine en patriotisme, on repeint le rejet en drapeau.

Je ne dis pas que les autres valent mieux : la gauche se perd dans sa morale, le centre dans sa mollesse, la droite dans ses privilèges. Mais ce qui m’a toujours frappé chez l’extrême droite, c’est cette manie de se déguiser en vérité :

Elle parle d’ordre, mais sème la division.
Elle parle d’amour du pays, mais méprise ceux qui ne rentrent pas dans son cadre.
Elle dit défendre la France, mais la réduit à une frontière et à un fantasme.

Ce qui est dangereux, ce ne sont pas seulement leurs idées — c’est l’apparence de sincérité qu’ils savent donner. L’apparence d’un peuple debout, d’une fierté retrouvée. Sauf qu’un peuple qui se nourrit de colère finit toujours par se mordre lui-même.

Je n’attendais pas une réponse de Marine Le Pen, seulement un signe d’écoute. Même un refus aurait eu du sens. Mais rien. Le silence, chez ces gens-là, c’est l’autre nom du mépris.

Le vrai pouvoir de l’extrême droite, ce n’est pas la vérité, c’est l’apparence de vérité. Un peu comme un maquillage bien posé sur une plaie ouverte : de loin, ça semble propre, presque rassurant. De près, ça suppure encore. Elle se nourrit des blessures du peuple, mais ne les soigne jamais. Elle préfère les entretenir, parce qu’un peuple en colère, c’est une foule docile. Il suffit de lui donner un ennemi à haïr et un chef à adorer.

L’apparence, c’est leur arme la plus fine. On remplace le mot haine par identité, le mot rejet par préférence nationale, et le tour est joué. On fait croire que défendre, c’est exclure ; que protéger, c’est punir ; que parler fort, c’est penser juste. Et ça marche, parce qu’une grande partie des gens n’écoute plus : ils ressentent, ils réagissent, ils sont fatigués, trompés, oubliés. Alors, le premier qui parle fort leur paraît sincère.

Mais derrière la façade, il n’y a pas d’amour du peuple : il y a le goût du pouvoir. Les discours changent, les slogans s’adoucissent, on gomme les angles, on met des sourires sur les affiches, on dit “je vous comprends” avec une main sur le cœur et l’autre sur le portefeuille électoral. C’est du marketing politique, rien d’autre. Les apparences, toujours.

J’ai connu des hommes et des femmes de terrain, des vrais, ceux qui bossent, qui galèrent, qui n’attendent rien de l’État. Eux ne portent pas de badge, ils n’ont pas besoin d’un drapeau pour exister.

Mais ils se font voler leurs colères par ceux qui prétendent les défendre. L’extrême droite, c’est la mise en scène de la souffrance populaire. Une pièce de théâtre où les acteurs jouent la misère, mais rentrent le soir dans leurs villas.

Alors, oui, j’ai écrit à Marine Le Pen, autrefois. Pas pour la juger, mais pour voir si le masque pouvait tomber. Elle ne s’est pas déplacée, le masque est resté bien accroché, là où il cache le plus : la peur du vrai dialogue.

Parce que dialoguer, c’est risquer d’être contredit, et ça, les apparences ne le supportent pas.

Aujourd'hui il ne reste plus rien pour croire en quelque chose. Si ! Le peuple, mais le peuple est corrompu et soumis à celui, ou celle, qui parle le mieux.

À méditer.

 

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