Les fonctions larvées

Publié le par François Ihuel

 

Le maire d'alors ou l'élection du mépris.

 

Les fonctions larvées

Un maire en 1889.

C'est la photo d'un des mes aïeuls maire d'une petite ville du Morbihan à la fin du XIX ème siècle.

C'était avant la grande guerre de 1914, cet aïeul, né en 1828, a vécu celle de 1870 provoquée par Napoléon III, donc une refonte en profondeur des règles républicaines après la période impérialiste de l'empereur déchu.

À ces époques être maire avait une toute autre valeur que le fonctionnement d'opérette d'aujourd'hui, loin de l'origine de la fonction d'administrateur du IX ème siècle ça restait toujours la fonction qui consistait à gérer une ville ou un village avec les finances, que la population confiait au Maire, pour administrer la vie de la ville ou du village, c'est-à-dire que le Maire devait se plier aux doléances de la population afin de fonctionner pour que la population ait les équipements et la sécurité pour laquelle elle versait de l'argent, les impôts donc.

De là le qualificatif de fonctionnaire au service de la population qui nomme ces fonctionnaires.

Jusqu'au XVI ème siècle le maire était nommé par le seigneur local, baron et marquis divers, et lui remettait environ un tiers de la totalité des recettes des impôts, le Maire se servait au passage et en faisait profiter quelques adulateurs avides de richesses et d'honneur, un peu comme maintenant mais moins dissimulé. C'est ce qu'on appelle aujourd'hui des conseillers municipaux et du clientélisme, la population soumise aux bons vouloirs de ceux qui la dirigent.

Pour en revenir à la haute fonction, aujourd'hui, après les multiples dérives et transformations des titres et des postes, le fonctionnement de l'État est totalement l'inverse bien que la constitution soit toujours basée sur celle d'origine votée le 3 Septembre 1791 par la première Assemblée Constituante - prémices de l'actuelle Assemblée Nationale.

Toutefois, les bourgeois - qui sont les vrais responsables de la révolution française contrairement à la fable que ce ne serait que le seul peuple - soutenus par une partie de la noblesse rurale, n'entendaient pas laisser le vrai pouvoir au peuple ; afin de s'arroger des pouvoirs discrétionnaires leur permettant de passer outre la volonté de ce peuple, pour eux négligeable, ils réforment la constitution de 1791 par celle de 1792, le peuple n'a servi qu'à créer l'agitation où pendant un an on lui a donné l'illusion de son pouvoir, comme aujourd'hui, par des gesticulations qui donnaient l'impression que c'était ce peuple le seul responsable des désordres créés par la révolution, peuple manipulé par les élus qui restent dans l'ombre. (C'est plus compliqué mais je simplifie)

Puis vint la monarchie de Juillet qui rétablit le roi, suivit de sa chute à peine quatre années plus tard, anéantie par la seconde révolution française de 1848 et l'instauration de la seconde république, cette dernière est de nouveau laminée par Napoléon III, d'abord Président de cette République, qu'il transforme en monarchie impériale un an plus tard en prenant presque les pleins pouvoirs jusqu'en 1870 quand il est fait prisonnier par les prussiens.

Adolphe Thiers est le premier président de la III ème République, c'est un ancien aristocrate - ce qui n'a pas trop changé aujourd'hui - qui fut Président du Conseil sous le régime monarchique de Louis-Philippe, ce qui laisse à penser que "sa république" avait des gouts orléanistes proche de la monarchie mais je ne vais pas réécrire les livres d'Histoire. Juste que le Président de la République voit ses pouvoirs réduits à la simple représentation, le vrai pouvoir est entre les mains des Présidents du Conseil successifs et ça va durer 70 ans.

C'est Albert Lebrun qui clôturera la III ème république en juillet 1940 suite à l'invasion éclair, encore une fois, de la France par l'Allemagne d'Hitler, un gout de déjà vu. Après le régime collaborationniste de Pétain, devenu marionnette de Laval dès 1942, suivi d'une grande confusion institutionnelle qui a failli faire gouverner la France par les américains si De Gaulle n'avait pas été là, viendra l'avènement furtif de 12 années de la IV ème République que De Gaulle clôturera par la création de la V ème République mais sans Président du Conseil, le Président de la République retrouve les pouvoirs constitutionnels et instaure le suffrage universel qui donne au peuple le pouvoir d'élire son président, ce qui est plus juste et plus représentatif du peuple.

On va me dire et le maire dans tout ça !

Et bien le fonctionnement municipal a suivi approximativement le même parcours, la plupart des Maires faisant partie d'une aristocratie locale la liberté tant voulue par le peuple n'a jamais vraiment existé, le fonctionnement municipal a toujours pour pilier le clientélisme et les finances, surtout dans les campagnes, et même encore aujourd'hui c'est le plus gros agriculteur qui a prépondérance sur les autres, en fait c'est le fric qui fait la fonction de maire en milieu rural et la puissance aristocratique dans les villes à quelques exceptions près.

 

Les fonctions larvées

Fonctionnement et bons vouloirs.

Dans la presque totalité des fonctionnements municipaux il y a cinq phases.

La première consiste à présenter un  candidat Maire, pour ce faire il faut se faire connaitre, ensuite afficher ses compétences, puis avancer des projets dit communs et faire campagne électorale, c'est la période doucereuse et affable, celle qui amorce la pompe à voter et qui déploie des moyens notables pour se faire bien voir.

Vient ensuite la phase électorale, là c'est l'apothéose, on promet tout et n'importe quoi - il sera toujours temps de revenir en arrière par des prétextes fallacieux - puis l'encensement de la pommade électorale, promettre tout à tout le monde, même l'impossible, pour ça il faut que le candidat s'entoure de personnages influents - le fameux clientélisme - qui eux auront effectivement gain de cause mais pas ce qui est dans les promesses publiques, juste ce qui est dans les promesses privées nettement différentes ; cette clientèle ayant le pouvoir d'influer sur pas mal d'électeurs potentiels il suffit de se faire affable et convainquant, la plupart du temps des gens ayant pignon sur rue et connus en qualité de commerçants, chefs d'entreprises, représentants d'institutions diverses ou gestionnaires de bureaux ayant la population comme clients, cabinets divers, responsables immobilier, etc..

Vient enfin la phase de fonctionnement une fois élu, ça consiste à mettre en place ceux qui ont aidé à faire élire, en principe la liste établie à l'avance, en prenant la précaution de leur donner des pouvoirs permettant de revenir sur les promesses électorales en trouvant des motifs divers, ce n'est pas ça qui manque et quand ça manque on les invente. 

Puis vient la Lune de miel, quatrième phase qui consiste à caresser dans le sens du poil ceux qui ont exposé leurs doléances pendant la campagne électorale, on fait exécuter l'urgent - qui de toute façon était déjà programmé - mais en s'arrangeant pour en prendre la paternité, on puise les idées et projets dans les programmes antérieurs des autres candidats en leur donnant un autre sens et un autre nom pour s'en garantir l'unique détenteur, puis on fonctionne quelques mois par de la clinquance et du visuel pour amadouer la population qui guette le fonctionnement. Des jeux, de l'amusement, du spectacle, du sport médiatique et des feux d'artifices en pagaille qui coutent un bras aux finances municipales.

Enfin arrive le réel objectif de l'élu et de ceux qui l'ont fait élire, c'est-à-dire créer ce qui leur est personnel en satisfaisant leur fantasmes privés, c'est-à-dire des objectifs, la plupart du temps financiers et rémunérateurs, qui sortent des promesses de campagnes déjà oubliées, c'est un peu ce qui se dessine aujourd'hui dans la ville de Briançon bien que pour le moment on ne voit que les ombres de ce qui va se produire. 

Une fois exécuté l'urgent prévu par les prédécesseurs, ou de longue date et déjà financé, on passe à du moins urgent et de plus aléatoire, jusqu'à faire passer le superflu avant l'indispensable, retour au fonctionnement du prédécesseur mais sous appellations différentes.

Il est vrai que le précédent monarque, méprisant pour ses administrés et tellement imbu de sa personne qu'il est entré dans l'Histoire de l'aristocratie détestable, n'en faisait qu'à son bon vouloir, ce qu'il a d'ailleurs précisé publiquement et officiellement à l'occasion de la réunion d'un conseil municipal face à une opposition minable opposant si peu que le chef de cette opposition s'est agenouillé devant ce monarque local d'opérette afin de lui aussi profiter des avantages qu'induit la fonction de conseiller municipal proche du Maire. Je ne préciserai pas tout ce qu'on peut faire à genoux devant quelqu'un d'autre.

Les premiers adjoints sont ceux qui bénéficient de la pommade élective, le problème c'est que ça fait gonfler la tête surtout quand déjà elle avait tendance à sortir de la boite crânienne, ça se constate à la suffisance et aux injonctions diverses qui animent les réunions diverses, pour peu que quelques responsabilités locales soient dédiées aux même conseillers et on a un Maire en second fort capable de prendre les rennes, donc la première place, en cours de mandat quand le Maire élu aura obtenu une fonction plus lucrative dans la hiérarchie administrative de l'appareil d'État, comme député par exemple.

Si ça ne se voit pas ça se devine, il suffit d'être observateur, de se manifester sans réponse et d'être écarté après avoir été approché pendant la campagne électorale. L'avantage de ceux qui ne sont pas élus c'est qu'ils peuvent monter, l'inconvénient de ceux qui le sont c'est qu'il leur faut conserver cette place si avantageuse pour leurs finances et leur notoriété illusoire, le problème quand on monte c'est qu'on peut aussi tomber, plus on est haut et plus la chute est douloureuse.

Sauf si l'élu reste fidèle à ses engagement et qu'il respecte ceux qui l'ont mis en place, c'est une denrée assez rare qui devient presque introuvable tellement la politique est devenue pourrie, comme partout, plus on gagne et moins on en donne.

Ce pour qu'on réalise localement que les efforts financiers municipaux dédiés ces derniers temps à quelques créations municipales sont déviés de ce qu'attendent les administrés, on voit apparaitre des réalisations personnelles qui passent pour des réalisations collectives avec force médiation locale pour leur donner une réalité qui n'a pas lieu d'être, alors passe à la trappe ce qui est indispensable pour favoriser les désirs personnels des élus afin de faire plaisir aux clients municipaux pour qu'ils influent sur les administrés qui les adulent en vue des élections futures, qu'elles soit locales, départementales ou nationales, un bon client bien servi c'est très utile pour ramener des voix pas vraiment sincères ni convaincues, la crédulité d'un peuple servile et infantilisé ça s'exploite.

Fort heureusement il y a des réalisations attendues qui sont exécutées, mais pour combien de temps ?

On voit disparaitre les volontés sécuritaires qui faisaient le cheval de bataille électoral, sauf que c'est sensible et que ça touche des associatifs qui sont aussi des clients municipaux, on dilue donc l'important en le minimisant et en faisant quelques actions médiatisées mais sans effets afin de cacher la merde au chat et pour garder ce qui alimente le fonctionnement associatif, le pognon c'est bon à prendre d'où qu'il vienne.

Je pense que ceux qui devinent un peu verront à travers mes lignes l'avertissement que je lance, à ceux qui pensent être arrivés, que le train administratif repart vers une autre gare électorale ; ce ne seront pas forcément les mêmes voyageurs. 

Bonne journée à tous et à très bientôt pour autre chose.

 

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Publié dans Briançon et politique

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