Volets volent

Publié le par François Ihuel

 

Je m'interroge

 

Photo et article : Le Dauphiné Libéré

Photo et article : Le Dauphiné Libéré

Accident ou négligence ?

Personne n'a oublié ce triste jour pour une touriste italienne, décédée suite à la chute accidentelle d'un volet.

La vieille ville souffre de sa durée, mais aussi des négligences, pas seulement celles de la ville mais aussi celles de quelques propriétaires, souvent bien loin d'ici, soit désinvoltes soit désargentés ; posséder un appartement, ou un immeuble, ne veut pas dire richesse, aussi quelques bâtisses sont encore dans un état lamentable, même si la façade donne l'impression du contraire. 

Des villes des siècles passés j'en ai visité quelques-unes, je n'en ai trouvé aucune qui soit aussi négligée.

Les apparences ne font pas tout, ce serait même parfois l'inverse, ce qu'on appelle cacher la merde au chat, si la ville a sa part dans ces négligences les propriétaires en ont une plus grande encore, posséder un bien dans une ville classée c'est un investissement couteux permanent, pas seulement à l'achat ; déjà les taxes diverses, auxquelles s'ajoutent l'impôt foncier et les assurances, il devient presque logique que l'entretien en pâtisse.

Cette vieille ville je la connais bien, j'y ai résidé dans divers immeubles et je suis bien placé pour savoir que certains induisent la crainte, murs profondément lézardés, effritement des enduits et mortiers, gouttières vétustes, qui ne tiennent que par miracle, encore quelques toitures en tôles ondulées rouillées, des bâtit de porche douteux, des boisures très attaquées par le temps et l'humidité, etc. 

Brulante en été, glacée en hiver, les vents sont traitres en ces lieux, la pire rue c'est la rue du Temple, très dégradée de manque d'interventions municipales elle est aussi une de celles qui laissent paraître les façades les plus délabrées, certainement la plus dangereuse en hiver quand les glaçons de fonte, qui regèlent la nuit, se transforment en poignards de plusieurs dizaines de centimètres et de plusieurs kilos, là aussi, dans le passé, il y a eu des accidents mortels.

Quand on connait les arrières cours, celles que personne ne voit jamais, en dehors des habitants qui y demeurent, on a, là, toute la vision des problèmes de sécurité, les incendies peuvent éclater à tous moments, surtout quand on sait ce qui est stocké dans ces arrières cours, carburants, bois, détritus, et bric-à-brac divers entassés depuis des décennies.

J'ai encore la vision du grand incendie de 2001, place d'Armes, là on a eu chaud, c'est le cas de le dire, même les pompiers italiens sont intervenus ; il faut dire que cette vieille ville c'est un bucher, les immeubles se tiennent ensemble depuis le bas, si l'un cède le reste suit, surtout vers le numéro 28 de la Grande rue, dans lequel j'ai habité en 1997, mes enfants l'appelaient "la maison penchée" ; le sol, incliné, imposait de caler les meubles, le jeu des gosses c'était de laisser rouler les billes et les ballons naturellement.

Les murs porteurs accusent une inclinaison qui ferait frémir un architecte, dans les lézardes des plafonds voûtés je pouvais y glisser la main entière. J'y passe de temps en temps, peu de choses ont changé, les fissures sont toujours là, rebouchées de temps en temps elles se rouvrent naturellement. Il faut dire aussi que la réfection du dernier étage, en 1997/98, par des italiens qui avaient acheté les combles, n'a rien arrangé, ils ont scié des tenons de charpente pour y créer des "chiens assis", il ont cassé la semelle en torchis, des combles, pour y couler un plancher en béton, très lourd, sur des murs qui ne sont pas conçu pour ça, on ne s'étonnera pas que la base soit aussi gonflée à en déformer le porche d'entrée. 

Bref, de ces détails que personne ne voit mais qui sont une menace permanente pour la sécurité. 

 

Volets volent

Place du Temple.

À l'angle de la rue du Commandant Carlhan, là où s'écoule, un peu plus bas, la petite gargouille. 

D'apparence propre, parce que les enduits ont été repeints, on devine la dégradation de l'immeuble, les fissures, moisissures et salpêtre, ressortent, ce sont de vieilles bâtisses, ceux qui les ont construites ne pensaient certainement pas au caractère historique des lieux, à ces époques les préoccupations étaient bien autres, et puis ce n'était qu'un village de haute montagne, juste conçu pour loger des habitants, avec réserves alimentaires et fourrage pour l'hiver, l'électricité n'existait pas, pas plus que l'eau courante, ni les toilettes et les évacuations, le chauffage c'était cheminées et quelques poêle à bois.

C'était la ville de haute montagne prise dans les neiges six mois sur douze, le climat de l'époque n'était pas celui de maintenant, la plupart de ces immeubles ont entre deux cent et trois cent ans, voir plus pour certains. Ils sont resté tel quel, du moins la structure, des pierres et du mortiers, rien de plus. Au fil des années des tirants sont venu rigidifier des murs qui s'écartent, l'isolation thermique ce n'était que le fourrage en toiture, il n'y avait pas de double vitrage. Quand ça s'est modernisé ont été rajoutés des cloisons internes, en placoplâtre pour la plupart, dans lesquelles on a glissé des gaines pour l'électrification, puis percé les sols pour y créer des sanitaires, tout ça à l'origine ce n'était pas prévu pour, ce qui fragilise les murs porteur. 

 

Volets volent

Les volets sont-ils d'origine ?

J'en doute, mais ils ont, pour beaucoup encore, presque un siècle, si ce n'est plus, les ferrures datent donc de ce temps où, si proche et si lointain, la ville était encore à caractère d'habitations, il n'était pas à l'ordre du jour d'en faire une réserve de gargouillards délaissés par la municipalité, le bas de la ville était encore très clairsemé, le centre stratégique de la ville c'était la vieille ville de maintenant.

Certes, beaucoup d'habitants, très attachés à leur vieille ville, ce dont je les loue, ont amélioré les lieux, redonné à ces immeubles un éclat agréable, heureusement d'ailleurs, ils ont refait les intérieurs, soucieux de la solidité et de la sécurité de ce qu'ils possèdent. J'en connais personnellement quelques-uns, ils se reconnaitront aisément même si je les vois rarement, les visites espacées étant les plus agréables.

Pas tous hélas, ceux qui sont loin, Marseille pour beaucoup, ou Milan, Turin, chez eux en Italie, ne savent peut-être même pas dans quel état est leur bien immobilier, seuls les locataires, souvent des gens peu argentés, sont les témoins de l'état des bâtisses, quelques-uns de mes enfants y ont habité, je sais très exactement ce à quoi je fait allusion.

Vétusté, boiseries attaquées par les vers, installations électriques dignes du début du XXème siècle, simple vitrage, dans des lieux où il n'est pas rare qu'il fasse moins quinze l'hiver, sombre, sans commodité, sentant le moisi et la vieille poussière.

L'intérieur est au diapason de l'extérieur, peut-être même pire parce que personne ne le voit.

 

Volets volent

Ça donne ça.

Un crépis douteux, de mauvaise qualité, sur des murs rongés de moisissures, de salpêtre, avec des ferrures métalliques rouillées, fixées sur des boiseries limite pourries, comment ça tient ! On se le demande.

Connaissant le climat local, cuit au soleil d'été et rongé par la neige et le gel l'hiver, les bâtisseurs anciens ont fait du bon travail que ce soit encore debout aujourd'hui.

On ne s'étonnera donc pas que l'accident, cité au début de cette page, soit arrivé, il y en aura d'autre, comme il y en a eu par le passé.

Cette vieille ville est classée monument historique, ce qui fait que les diverses interventions de réparation doivent passer par toute une filière administrative, imbécile et incohérente, pour que les propriétaires puissent effectuer des travaux, mais pas n'importe quels travaux, il faut que ce soit dans le caractère des lieux, avec des matériaux spécifiques autorisés par le service des bâtiments de France.

C'est un coût de 30 à 50 % plus élevé que des réfections classiques, on peut comprendre que pas mal de propriétaires ne puissent effectuer des réfections, ce ne sont pas les loyers de leurs locataires, souvent des gens de très modeste condition, qui vont financer ce qui est indispensable.

Les vrais fautifs ne sont pas les propriétaires auxquels on impose des critères draconiens, ce sont les autorités imbéciles et obtuses qui sont les responsables des accidents générés par la vétusté de ce qui existe. 

Regardez-bien cette dernière photo, c'est révélateur des dangers auxquels sont exposés les touristes, mais aussi les riverains, en permanence.

Est-ce que d'attirer l'attention de ce problème, parmis tant d'autres, va changer les mentalités directives ?

J'en doute, rien qu'à lire ma page d'hier on comprend que l'ambition des élus ce n'est pas s'occuper des administrés, c'est en profiter à leurs dépends.

Bonne soirée à tous et à très bientôt

 

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Publié dans Briançon

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